Le pont sur la Drina, de Ivo Andric (Le Livre de Poche) — ISBN-13 : 97822253933212 — 380 pages — 7,70 € — Genre : Faire un pont pour de bon.
Aujourd’hui, j’ai décidé de vous présenter le livre le plus connu de l’auteur d’origine croate (toujours et encore, mais promis, c’est la dernière fois) qui reçut le prix Nobel de littérature en 1961. Par conséquent, Je vous emmène vers Le pont sur la Drina, de l’écrivain Ivo Andric. Et par la même occasion, je réponds au défi de Madame lit.
La Drina, c’est le nom d’une rivière tumultueuse qui se trouve dans le sud de la Bosnie-Herzégovine et qui traverse la ville de Visegrad, c’est là que le grand vizir Mehmed Pacha Sokolovic décide de construire un pont, afin de faciliter la libre circulation des biens, des marchandises et des hommes (j’ai déjà entendu ça quelque part). Par conséquent, même si le vizir connaît parfaitement la région, puisqu’il y est né avant d’avoir été enlevé et envoyé en Turquie pour être converti et formé à ses nouvelles fonctions, il aura toutes les peines du monde à faire avancer les travaux. En effet, la population locale va tout faire pour saboter le projet à cause des mauvais traitements qu’elle subit, sans parler du fait que les gens ne sont pas payés. Toujours est-il que la construction du pont sera achevée en 1571. Certes, la construction est belle, mais elle est surtout très pratique et puis au centre de celle-ci se trouve la « kapia », c’est une sorte de petite place sur laquelle les gens se croisent et s’arrêtent afin de s’amuser, jouer aux cartes, discuter et débattre autour d’un verre, mais aussi se disputer. Sur cette « kapia », centre névralgique et historique de la ville, les échanges entre les trois communautés (chrétienne, musulmane, juive) se font et se défont. Et ce pont, il en aura vu des choses en plus de 400 ans. L’arrivée des Ottomans, l’arrivée des austro-hongrois, l’arrivée de la Première Guerre mondiale… Mais le magnifique pont en pierre verra aussi la petite histoire, celle des gens qui se feront tuer ou bien torturer, celle de la crainte et de la souffrance, celle de l’espoir et du désespoir, celle de la folie des hommes qui savent aussi construire l’avenir, celle de la vie tumultueuse qui se déroule dans une région qui a souvent connu la guerre.
On ne pouvait jamais mieux percevoir la beauté insolite et exceptionnelle de la kapia que par ces jours d’été, à cette heure-là. L’homme y était assis comme sur une balançoire magique : il parcourait la terre, il voguait sur l’eau, il volait dans les airs, et pourtant il restait fermement et solidement ancré à sa ville et à sa maison blanche qui était là, tout près, entourée de son jardin et de sa prunelaie. Sur la kapia, buvant du café et fumant, beaucoup de ces modestes citadins, qui ne possédaient guère que cette maison et une petite boutique dans le bazar, ressentaient dans ces heures-là toute la richesse du monde et l’infinie grandeur des dons de la Providence. Tout cela, un simple édifice pouvait l’offrir aux hommes, des siècles durant, lorsqu’il était beau et puissant, lorsqu’il avait été conçu au bon moment et érigé au bon endroit, et que sa construction avait été couronnée de succès.
Vous l’aurez compris, le personnage principal du livre, c’est le pont, mais « Le pont sur la Drina », c’est surtout un roman historique sur la Bosnie-Herzégovine. Dans ce roman, la souffrance est présente à chaque instant, car c’est une région qui a connu d’innombrables guerres. L’auteur restitue avec brio (à travers de nombreuses anecdotes) les changements politiques et sociétaux qui ont eu lieu dans cette région au fur et à mesure de l’arrivée des nouveaux occupants et colonisateurs. Les habitants, souvent résignés, ont su adapter leurs us et coutumes, mais aussi parfois se révolter, c’est ce que l’écrivain a su très bien restituer. « Le pont sur la Drina » est un roman foisonnant dont la grande histoire (celle du pays) est enrichie d’innombrables petites autres (celles de la population). Il paraît que l’histoire est un éternel recommencement, ce livre d’Ivo Andric semble prouver ce vieil adage. Quoi qu’il en soit, je vous invite à découvrir Le pont sur la Drina, un roman que j’ai essayé de ne pas trop dévoiler afin de ne pas vous gâcher le plaisir.
Qu’en pensez-vous ? Merci de m’avoir lu.
Moi qui aime allier littérature et Histoire cela pourrait vraiment m’intéresser et m’aider à mieux connaître ce pays.
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C’est pourtant très facile à comprendre 😉
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non mais !
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Bon, on ne pourra plus dire qu’on n’a pas d’idées de lectures croates !
Ingannmic
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C’est la dernière, promis 🙂
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J’ai aimé ta chronique, elle me fait voyager et j’aime ça en cette période de prudent repli… De là à acheter des livres… Cela semble reporté à plus tard. Heureusement j’ai fait des réserves à défaut de stock de nourriture !
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Je n’est quasiment plus aucun livre à lire… Snif Snif 😉
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Belle idée de voir l’histoire d’un pays à travers celle d’un pont … en tout cas, c’est original.
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Oui. 🙂
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Très original en effet. J’ai beaucoup, encore et encore Goran, aimé la citation. Tu fais exprès? 😉 Titre noté pour le bilan et merci pour la mention. 🙂
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🙂
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Encore ce Goran et ses livres croates :-). Je me demandais qui serait le premier à chroniquer ce livre, bravo à toi. Ta chronique donne vraiment envie de le découvrir, je pense avoir un de mes titres pour 2021 !
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C’est promis, c’est la dernière fois 🙂
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C’est certainement un livre exceptionnel mais il y a quelques semaines je voulais lire un passage au hasard et j’ai eu de la chance…. deux pages horribles qui m’ont choquée. Donc je l’ai reposé 🙂 Mais l’écriture est vraiment prenante et le prix Nobel ne m’étonne pas du tout.
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Quelles sont ces pages ? 🙂
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p. 49-53 😉
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As-tu encore le livre ?
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Je garde tous mes livres, ça commence à devenir compliqué, je sais je suis maso… 🙂 J’irais donc vérifier…
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Tu ne pratiques pas du Feng Shui alors 😃. Ici, c’est pareil, même si on commence à faire des efforts ces derniers mois (on râle quand on déménage).
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Pourtant j’aime le zen et Monk pourrait dormir chez moi 🙂
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🙂
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J’allais dire que c’était le deuxième livre croate qui me faisait vraiment de l’oeil, mais j’attends la réponse d’Eva pour me faire un avis définitif…
Ton billet me fait penser à « La Porte » de Szabo qui m’attends et beaucoup plus curieusement à « La Terre qui penche » de Carole Martinez.
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Je notes « La Terre qui penche », je ne connais pas…
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J’ai beaucoup aimé La porte.
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C’est à Goran de dire si le livre est plutôt violent (déjà l’histoire de ces régions n’est pas les plus douces…). Je n’ai lu que quelques pages mais je peux dire que les descriptions sont très visuelles et l’histoire très captivante. Patrice le lira pour l’année prochaine.
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Difficile de répondre, car mon curseur est vraiment très haut, je n’ai, de mon côté, rien trouvé de choquant…
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Je viens de lire le passage en question et je le trouve très bien moi 😉
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Ton livre n’est pas bien numéroté, j’en suis sûre… 😉
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haha 🙂
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Mon curseur à moi est plutôt très bas, je suis une petite nature…
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🙂
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Je pense que de nombreux pays de l’Europe de l’Est racontent tous cette histoire d’invasion, de colonisation, de souffrances et de mort liées à la domination des envahisseurs et à la privation de liberté. Et pourtant cela donne une littérature très diverse, très florissante mais souvent pessimiste et grave. Encore que beaucoup sachent réagir soit par l’humour, soit en développant la richesse de leur imaginaire comme dans Le Papillon : .
https://claudialucia-malibrairie.blogspot.com/2020/03/andrus-kivirahk-le-papillon.html
Un autre lien : Tourguéniev les eaux printanières
https://claudialucia-malibrairie.blogspot.com/2020/03/tourgueniev-les-eaux-printanieres.html
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Merci !
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Ah, celui-ci je l’avais noté, je souligne !
Voici une participation » classique » : » Dernier jour à Budapest » de Sandor Marai.
http://www.lireetmerveilles.fr/pages/lectures/dernier-jour-a-budapest-sandor-marai.html
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Merci.
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Je l’ai lu, il y a plusieurs années. Un livre magnifique et assez déroutant qui ne raconte pas à proprement parler un histoire mais l’histoire d’un lieu (le pont) au travers les âges. C’est captivant et cela m’a permis de découvrir Andric (je n’ai rien lu d’autre de lui).
Et la scène du supplice du pal est, à proprement parler, insoutenable.
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