Underground ou un héros de notre temps, de Vladimir Makanine (Gallimard) — ISBN-13 : 9782070753505 — 575 pages — 30,50 € — Genre : J’ai raté ma vie.
Comme bien souvent ces derniers temps, je rédige cette critique plusieurs semaines après avoir lu le roman. Comme à chaque fois, j’espère avoir les idées suffisamment claires pour vous écrire quelque chose d’intéressant, mais ce n’est pas gagné. Enfin, bref, venons en à l’essentiel…
L’action du livre se déroule en Russie et plus précisément à Moscou entre la fin des années 80, c’est-à-dire quelque temps avant la chute du rideau de fer et du mur de Berlin, et le début du monde d’après, celui qui vient après la chute du régime soviétique. Le KGB est encore très présent, même s’il ne semble plus aussi terrifiant qu’avant. Toujours est-il que dans cette histoire nous suivons le parcours de Pétrovitch, c’est ainsi que tout le monde l’appelle dans l’immense immeuble communautaire (qui ressemble à nos joyeux HLM) dans lequel il est gardien, car son véritable nom est Pavel Andreevitch. Mais qui est véritablement ce dernier ? Il s’agit d’un écrivain raté qui n’a jamais réussi à publier (encore un), il s’agit d’un homme désabusé et misanthrope qui survit (tant bien que mal) en jouant le rôle de gardien, il surveille les appartements inoccupés par les locataires en s’y installant, ce qui permet à notre Pétrovitch (quasi clochard) de ne pas dormir dans la rue. Vous l’aurez compris, l’emploi de Pétrovitch n’a rien d’officiel. Quoi qu’il en soit, dans cette immense cité dortoir, Pétrovitch fera de nombreuses rencontres, car la plupart des résidents se confieront à ce gardien, pas comme les autres, qui nous fait découvrir d’un œil acerbe une société en pleine mutation. Dans cette dernière, les nouveaux maîtres du jeu ne sont pas encore tout à fait en place, mais les anciens laissés-pour-compte, comme l’ancienne amie de Pétrovitch (une prostituée et alcoolique, devenue une figure politique), peuvent tirer leur épingle du jeu. Sauf que le personnage principal de ce livre (dont le frère artiste, broyé par l’ancien régime, va finir interner à l’asile) préférera rester dans l’underground, poursuivre sa descente en enfer, plutôt que de vendre son âme au diable. Un diable représenté par l’ancienne ou bien la nouvelle société naissante.
Tchekhov a joliment dit qu’il avait extirpé goutte après goutte l’esclave vivant en lui. Et il avait joliment passé sous silence comment il avait comblé le vide creusé par la disparition de ces fameuses gouttes. Avec des mots ? Une littérature enfin affranchie ?… C’est l’idée qui s’impose.
Je ne me rappelle plus comment j’ai entendu parler de cet écrivain, mais j’ai adoré ce roman sombre et désabusé, j’ai adoré le style, j’ai adoré le ton, j’ai adoré l’histoire. D’ailleurs, le résumé que je fais du livre peut sembler léger, mais il s’agit d’un texte extrêmement dense et dans lequel il se passe beaucoup de choses, comme des assassinats, des parties de jambes en l’air, des internements. Il faut dire que dans le portrait que dresse Vladimir Makanine de son pays et peuple, la folie et le chaos ne sont jamais loin… Parfois, lorsqu’on aime un roman, on ne sait pas trop expliquer pourquoi, c’est souvent une question de ressentie, mais dans le cas du texte d’aujourd’hui il me semble que je sais d’où me vient mon engouement pour ce récit. En effet, lorsque je me suis renseigné sur l’auteur (mort en 2012), j’ai appris que ce dernier avait obtenu le prix européen de littérature, mais surtout (et c’est sans doute pourquoi j’ai aimé ce livre) qu’il était considéré comme un « classique vivant ». Et vous devez savoir que j’aime plus que tout les classiques. J’ai aussi appris que des critiques ont condamné l’amoralisme de l’écrivain. Avec tout ça, je ne pouvais qu’aimer… Quod erat demonstrandum ! En tout cas, j’ai vraiment hâte de découvrir tout le reste de l’oeuvre de Vladimir Makanine. Petite question à moi-même, mais si vous savez répondre je suis preneur, je me demande si le titre de ce roman ne fait pas référence à celui Lermontov Mikhaïl Iourievitch ?
Qu’en pensez-vous ? Merci de m’avoir lu.
J’ai rédigé cette critique dans le cadre du mois de de l’Europe de l’Est d’Eva, Patrice et Goran.
Lermontov? Sans doute. ^_^
Ceci étant, je ne connais pas cet auteur contemporain dont tu parles aujourd’hui.
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Sans doute alors 😉
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Ca a l’air pas mal du tout !!!
Maintenant j’ai « Mon HLM » de Renaud dans la tête ! AHh !
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Hihihi
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tu as raison on ne sais jamais pourquoi un roman nous touche, mais ce qui est certain c’est que le style de l’écrivain y est toujours pour beaucoup.
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C’est vrai… 🙂
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Mais tu lis des pavés ! Alors que je lis des nouvelles 😉
Je ne connais pas du tout cet auteur, je le note pour regarder s’il y a quelque chose à la bibliothèque 😉
Bon weekend 🙂
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Merci et bon week-end également…
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Toujours un talent incomparable pour dénicher de tels titres !
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Merci Patrice
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Hmmm, ça me parait vraiment très intéressant! Ta phrase sur le fait que le livre se déroule dans un immeuble communautaire m’a remis en mémoire ma lecture (lointaine) de La Cour, d’Arkady Lvov même si ça se passe autre part (Odessa) et à un autre temps (années 1930 à 1950) et que l’histoire n’a rien à voir. Tu connais?
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Malheureusement, non, je ne connais pas…
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Intéressant… un classique vivant! C’est original. Merci pour cette présentation.
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J’ai trouvé aussi 😉 Merci à toi.
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Je note, j’aime bien les romans d’immeubles et celui-ci a l’air très intéressant. Alors si c’est un coup de odeur en plus !
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Coeur pas odeur ! Tsss.
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L’odeur c’est bien aussi 🙂
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Oui 😉
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