Le Chef-d’oeuvre inconnu, de Honoré de Balzac

Le Chef-d’oeuvre inconnu, de Honoré de Balzac (Le Livre de Poche) — ISBN-13 : 9782253138082 — 80 pages — 2 € — Genre : Artiste incompris.

Je rédige cette critique dans le cadre du défi littéraire organisé par « La Bouche à Oreilles ». J’ai trouvé le sujet très intéressant, je ne pouvais passer à coter, et puis en même temps cela m’a donné l’occasion de revenir vers un écrivain que je n’avais pas lu depuis longtemps : Honoré de Balzac.

Comme d’habitude, je commence mon billet en vous racontant l’histoire du livre. D’ailleurs, comme il s’agit d’une nouvelle assez courte, je vous préviens que je vais être assez explicite. Ainsi, le texte débute avec le jeune Nicolas Poussin, c’est un élève désireux d’apprendre avec les plus grands peintres, qui se rend chez son maître François Porbus. Sur le palier de ce dernier, celui qui n’est encore qu’un apprenti croise un vieil homme : Maître Frenhofer. Le vieillard est un expert qui en deux coups de pinceau (sur une toile de François Porbus) montre comment améliorer une peinture et toute l’étendue de sa technique. Maître Frenhofer maîtrise son art et pourtant il ne parvient pas à finir son tableau, celui sur lequel il travaille depuis dix ans, car il souhaite atteindre la perfection. Toujours est-il qu’après quelques pages le maître Frenhofer finit par conclure, non pas avec sa muse, mais avec sa toile, je sais, c’est un mauvais jeu de mots, mais je n’ai pas trouvé mieux. En tout cas, le vieil homme invite chez lui François Porbus et Nicolas Poussin afin de leur dévoiler son chef-d’œuvre. Et là, c’est le drame, car les deux hommes ne comprennent pas le tableau, pour eux c’est complètement raté, cela ne ressemble à rien, etc. En gros, le pauvre homme a travaillé dix ans pour rien. Maître Frenhofer laisse exploser sa rage et sa colère, il ne parvient pas à concevoir que son chef-d’œuvre n’en est pas un. Et c’est là qu’arrive la chute de l’histoire, mais sur laquelle je préfère me taire pour ne pas vous gâcher le plaisir…

― Comment ! s’écria-t-il enfin douloureusement, montrer ma créature, mon épouse ? déchirer le voile sous lequel j’ai chastement couvert mon bonheur ? Mais ce serait une horrible prostitution ! Voilà dix ans que je vis avec cette femme, elle est à moi, à moi seul, elle m’aime. Ne m’a-t-elle pas souri à chaque coup de pinceau que je lui ai donné ? Elle a une âme, l’âme dont je l’ai douée. Elle rougirait si d’autres yeux que les miens s’arrêtaient sur elle. La faire voir ! mais quel est le mari, l’amant assez vil pour conduire sa femme au déshonneur ? Quand tu fais un tableau pour la cour, tu n’y mets pas toute ton âme, tu ne vends aux courtisans que des mannequins coloriés. Ma peinture n’est pas une peinture, c’est un sentiment, une passion ! Née dans mon atelier, elle doit y rester vierge, et n’en peut sortir que vêtue. La poésie et les femmes ne se livrent nues qu’à leurs amants ! Possédons-nous le modèle de Raphaël, l’Angélique de l’Arioste, la Béatrix du Dante ? Non ! nous n’en voyons que les Formes. Eh ! bien, l’œuvre que je tiens là-haut sous mes verrous est une exception dans notre art. Ce n’est pas une toile, c’est une femme ! une femme avec laquelle je pleure, je ris, je cause et pense.

Le Chef-d’oeuvre inconnu, de Honoré de Balzac est un très beau texte qui contient énormément de passages sur ce qu’est l’art, la peinture, la création artistique… Cette nouvelle parle des mystères de l’art et du processus créatif, mais pas seulement, car ce texte c’est aussi l’histoire d’un homme qui s’éveille (Nicolas Poussin) et un autre qui se meurt : Maître Frenhofer. Je pense que tous les artistes en herbe apprécieront ce récit, mais pas seulement, car il faut dire que le style de Balzac est beau, intelligent, parfois technique dans ce cas précis, mais tellement plaisant. Pour conclure, sachez que La belle noiseuse (film de Jacques Rivette) est une adaptation libre de la nouvelle de Balzac.

Qu’en pensez-vous ? Merci de m’avoir lu.

J’ai rédigé cette critique dans le cadre du printemps des artistes.

22 réflexions sur “Le Chef-d’oeuvre inconnu, de Honoré de Balzac

  1. Bon jour,
    J’aime Balzac. Il est à la fois « écrivain, scénariste, critique, romantique, photographe, psychologue, paysagiste, architecte, etc,etc » … son style est « fouillé » … il connaît ses personnages femmes ou hommes sur le bout des doigts… ses écrits nous font pénétrer dans « l’espace/temps » de ses narrations …
    Merci pour ce partage … 🙂
    Max-Louis

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  2. Un classique de chez classique, avec cette vision mystérieuse de l’art et de la création, de l’artiste systématiquement rejeté et incompris par ses pairs… À noter que Picasso a habité à l’adresse où est censé se passer le roman (quais des Grands Augustins) et y a peint Guernica. Un roman qui a donc un parfum de réalité…

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